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De mis​è​re et d'amour

by Cie La Mouche

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1.
Quand tout l’monde doit être dans son lit Mézigue trimarde dans Paris En hiver les rognons cinglés En été les arpions brûlés. La nuit tout' la Ville est à moi, J'en suis comme qui dirait le Roi. J' suis l'Empereur du Pavé, L' princ' du Bitum', l' duc du Ribouis, Le comt' Flageolant-des-Abatis. J' suis l' baladeur... le bouff'-purée, Le rôd'-la-nuit... le long'-ruisseaux, Le marque-mal à gueul' tirée, Le mâch'-angoiss'... le cause-tout-haut. J'ai beau m' trémousser, j'ai pas l' rond, Je suis tremblant, je suis traqué, J' suis l' Déclassé... le gas distingué Qui la fait à la poésie. Je suis un placard à Douleurs, Je suis l'Artiste, le Rêveur, Le Lépreux des Démocraties. Moi ? Plaire ? Jamais de la vie. Je veux être entendu et compris."
2.
Do mon petiot ; do ma tototte… Te viens d’ t’effrondrer su’ l’ crottoir Comme un bestiau à l’abattoir Ou comme un qui s’rait en ribotte. V’lan ! Nib de fieu ! Floc ! Never more ! Les passants caus’nt : « C’est h’yeun’ syncope, Faurait l’ poser chez l’ pharmacope ! » Toi… tu caus’s pas, pisque t’es mort. Un Mossieu qu’a un beau pardosse Dit : « J’ la connais c’est du chiqué ! » Toi, tu t’ostin’s à fair’ la rosse Et tu t’ tais pisque t’es claqué. Ton bloum pisseux roulé à terre, Ta p’lur’, tes tifs en escaïers, Tes sorlots qui montr’nt tes goigts d’ pieds Font croir’ qu’ t’es pas un meuyardaire. Voyons un p’tit peu c’ qu’y t’a pris ; On t’ lèv’, on ouvr’ ta requimpette, V’là qu’on voit qu’ t’avais pus d’ liquette Et qu’ tes boïaux sont vert-de-gris. Oh ! ça fait voir d’ quoi t’es crevé ; Chacun se z’yeute avec malaise, Le Mossieu lui… s’ tire à l’anglaise Du temps qu’on t’arr’couch’ su’ l’ pavé. Do rataplan ! Do Mad’moiselle… De loin, légers comm’ des gazelles Deux sergeots s’amèn’nt essouflés, La gueul’ pleine de « Circulez ! » T’as d’ la veine d’êt’ cuit, autrement Qué qu’on t’ pass’rait dans l’ genre mandales Pour t’apprendre à fair’ du scandale Et « causer des rassemblements » ! C’mment mon pauv’ vieux, en plein Paris, A deux pas de chouatt’s devantures T’es clamsé faute ed’ nourriture ? Pas possib’, c’était h’un pari ! Sûr qu’avant d’en arriver là T’as dû t’ cogner à ben des seuils, Pus d’eun’ fois rester chocolat, Le ventre vide et l’ coeur en deuil. Bah ! à présent, do ma filleule… Quoi qu’ t’aye pleuré, quoi qu’ t’aye souffert, Te v’là sorti de not’ enfer, T’es « arrivé », tu t’ fous d’ nos gueules. Avec eun’ bonne grâce essquise, Les flics te lèv’nt à leur hauteur Et te balanc’nt comme eun’ marquise D’autrefois, en chaise-à-porteurs. Les mêm’s, qui t’emport’nt au p’tit trot, T’auraient truffé d’ coups d’ bottes ou d’ giffes Si t’avais fait grève ou d’ la r’biffe Ou bouffé l’oeil chez Bistrot. Les passants qui sont cor émus S’en vont chacun à leu’ z’affaires ; Tout à l’heure y n’y pensaient guère, A l’estant y n’y pens’ront pus. Adieu mon p’tit, pars… pour la Morgue. Tout l’ mond’ peut pas, évidemment, S’ procurer pour son enterr’ment Les griftons, la grand Messe et l’orgue.
3.
Seigneur Jésus, je pense à vous ! Ça m’ prend comm’ ça, gn’y a pas d’offense ! J’ suis mort’ de foid, j’ me quiens pus d’bout, Ce soir encor… j’ai pas eu d’ chance Et vous aussi, Vierge Marie, Sainte-Vierge, Mère de Dieu, Qui pourriez croir’ que j’ vous oublie, Ayez pitié du haut des cieux. J’ suis là, Saint’ Vierge, à mon coin d’ rue Où d’pis l’apéro, j’ bats la semelle ; J’ suis qu’eune ordur’, qu’eun’ fill’ perdue, C’est la Charlotte qu’on m’appelle. Sûr qu’avant d’ vous causer preumière, Eun’ femme qu’est pus bas que l’ruisseau Devrait conobrer ses prières, Mais y m’en r’vient qu’ des p’tits morceaux. Vierge Marie… pleine de grâce… J’ suis fauchée à mort, vous savez ; Mes pognets, c’est pus qu’eun’ crevasse Et me v’là ce soir su’ l’ pavé. Si j’entrais m’ chauffer à l’église, On m’ foutrait dehors, c’est couru ; Ça s’ voit trop que j’ suis fill’ soumise… (Oh ! mand’ pardon, j’ viens d’ dir’ « foutu. ») N’est-c’ pas que vous êt’s pas fâchée Qu’eune fill’ d’amour plein’ de péchés Vous caus’ ce soir à sa magnère Pour vous esspliquer ses misères ? Dit’s-moi que vous êt’s pas fâchée ! C’est vrai que j’ai quitté d’ chez nous, Mais c’était qu’ la dèche et les coups, La doche à crans, l’ dâb toujours saoul, Les frangin’s déjà affranchies… C’est vrai que j’ai plaqué l’ turbin. Mais l’ouvrièr’ gagn’ pas son pain ; Quoi qu’a fasse, elle est mal payée, A n’ fait mêm’ pas pour son loyer ; A la fin, quoi, ça décourage, On n’a pus de coeur à l’ouvrage, Ni le caractère ouvrier. J’ dois dire encor, Vierge Marie ! Que j’ai aimé sans permission Mon p’tit… « mon béguin… » un voyou. (Mais quand on a trinqué tout gosse, On a toujours besoin d’ caresses, On se meurt d’amour tout’ sa vie : On s’arr’fait pas que voulez-vous !) Enfin, je suis déringolée, Souvent on m’a mise à l’hosto, Et j’ m’ai tant battue et soûlée, Que j’en suis plein’ de coups d’ couteau. Bref, je suis pus qu’eun’ salop’rie, Un vrai fumier Vierge Marie ! Malgré comm’ ça qu’ j’aye fait la vie, J’ai pensé à vous ben souvent. Et ce soir encor ça m’ rappelle Un temps, qui jamais n’arr’viendra, Ousque j’allais à vot’ chapelle Les mois que c’était votre fête. J’arr’vois vot’ bell’ rob’ bleue, vot’ voile, (Mêm’ qu’il était piqué d’étoiles), Vot’ bell’ couronn’ d’or su’ la tête Et votre trésor su’ les bras. Aussi, si vous vouliez, Saint’-Vierge, Fair’ ce soir quelque chos’ pour moi, En vous rapp’lant de ce temps-là, Ousque j’étais pas eune impie ; Vous n’avez qu’à l’ver un p’tit doigt Et n’ pas vous occuper du reste… J’ vous d’mand’ pas des chos’s… pas honnêtes ! Fait’s seul’ment que j’ trouve et ramasse Un port’-monnaie avec galette Perdu par un d’ ces muf’s qui passent (A moi putôt qu’au balayeur !) Ou alors, si vous pouvez pas Ou voulez pas, Vierge Marie… Vous allez m’ trouver ben hardie, Mais… fait’s-moi de suit’ sauter l’ pas ! Et pis… emm’nez-moi avec vous, Prenez-moi dans le Paradis Ousqu’y fait chaud, ousqu’y fait doux, Où pus jamais je f’rai la vie. Ah ! emm’nez-moi, dit’s, emm’nez-moi Avant que la nuit soye passée Et que j’ soye encor ramassée ; Saint’-Vierge, emm’nez-moi, j’ vous prie ? Je n’en peux pus de grelotter… T’nez… allumez mes mains gercées Et mes p’tits souliers découverts ; J’ n’ai toujours qu’ mon costume d’été Qu’ j’ai fait teindre en noir pour l’hiver.
4.
« M’man ? Laiss’-moi voir les p’tit’s baraques Dis… arrêt’ toi M’man… m’ tire pas ! Tu m’ sahut’s, tu m’ fais mal au bras… Aïe, M’man ! Tu fous toujours des claques ! M’man, les « bolhommes » ! M’man, les « pépées », Les « ciens d’ fer », les flingu’s, les « misiques », Les sabr’s, les vélos « mécaliques » ! Oh ! Moman, c’ que j’ suis egniaulé ! C’ qu’y coût’ cher « l’ ceval » du milieu ? Ç’ui-là qu’est pus grand qu’eune enseigne ? J’ vourais l’avoir, moi, nom de guieu ! Aïe, M’man ! tu fous toujours la beigne ! N’ t’occup’ pas si tu n’as pas d’ sous, C’est pas pour m’ach’ter que j’ t’arrête ; Mais rien que d’ z’yeuter les joujoux, Moi ça m’ fait du bien aux mirettes. Oh ! làlà, c’ que j’ suis fatigué ! On l’est pas h’encore à Saint-Ouen ? Pus qu’on trotaill’, pir’ que c’est loin, Oh ! moman, c’ que j’ suis fatigué ! La neige entr’ dans mes godillots ; Ça fait du tort à mes z’eng’lures ; J’ai beau êt’ un gas à la dure, J’ai comme un lingu’ dans les boïaux ! Tu sais l ‘sal’ môm’ de l’épicier ? Y fait son crâneur, son borgeois ; L’aut’ nuit, l’a eu dans ses souliers Eun’ tit’ balance et des vrais poids… N’avec eun’ bell’ petit’ bagnole, Eun’ boît’ de troufions, un guignol ; C’est « l’ Pèr’ Noël », à c’ qu’y paraît ; Pour voir, dis Moman, c’est-y vrai ? « Vous, qu’y nous a d’mandé, les crapauds, ‘spliquez-moi c’ que vous avez eu De la part du « Petit Jésus » ? Alors, tu sais c’ qu’y nous a dit, M’man ? Y nous a app’lés « plein-d’-poux » ; « Le Pèr’ Noël, c’est sûr, pardi, Va pas chez des purées comm’ vous ! » Vingt dieux ! Du coup, moi, mes frangines, Tout dessus on y a cavalé : Ah ! qu’est-c’ qu’on y a mis comm’ volée ! Dame aussi ! Porquoi qu’y nous chine ! Pis… on y a cassé ses affaires ; Pis après, on s’a fait la paire ; Ben, tu sais pas c’ qu’y nous a dit ? « Tas d’ salauds, j’ vas l’ dire à mon père Et j’ vous f’rai couper vot’ crédit ! » …………………………………………… …………………………………………… Oh ! làlà, Moman ! Quoi qu’y t’ prend ? Marée ! C’est lui la « mauvais’ graine » ! Aïe ! Oh ! Soupé ! Merd’ c’ que j’étrenne ! Sûr, on voit ben qu’ c’est l’ Jour de l’An !
5.
Idylle 08:06
Môm’, c’que t’es chouatt’ ! Môm’, c’que t’es belle ! Je sais pas c’ que t’as d’pis quéqu’s temps, C’est sans dout’ l’effet du Printemps Et qu’ tu viens d’avoir tes quinze ans, Mais c’ qu’y a d’ sûr... t’es pus la même. J’ t’ai vue qu’ tu jouais à la marelle, Au diabolo ou au ballon, Y n’y a pas h’encor si longtemps ; T’étais eun’ « sal’ quill’ » pour les gas, Moche et maigr’ comme un échalas. Mais, depis p’t-êt’ mêm’ pas deux s’maines, Voilà qu’ tu t’es mise à éclore Comm’ qui dirait un bouton d’or ; T’es sangée... c’est la nuit et l’ jour ; Preusent t’es forcie et t’es ronde, T’as pris d’ la fesse et des nichons Et, pus on s’avance en saison, Pus tu d’viens meugnonne et gironde. Oh ! voui pour sûr qu’ t’ es pus pareille Et qu’ t’es d’venue eun’ rich’ goss’line Qui sent l’amour et la santé ; Mais surtout, Môm’, t’as d’ bell’s grand’s mires Qu’ont l’air d’éclairer tout Paris ; O Môm’... je sais pas comment dire... Quand qu’ tu tiens tes beaux cils levés, Ça fait penser aux marguerites Qui vous regardent dans les prés. Dis, Môm’, tu viens jusqu’aux fortifs ? On s’allong’ra su’ le gazon Et, si on pousse au « Robinson », On f’ra eun’ partie d’ balançoires, On s’ bécot’ra sous la tonnelle, On bouff’ra des frit’s ou des crêpes Et on boira l’apéritif ! Dis, Môm’, tu veux-t’y êt’ ma poule ? J’ s’rai ton « p’tit homm’ », tu sais, j’ suis gas ; J’ te défendrai, j’ te battrai pas, Et pis, si un jour on s’ dispute, Jamais j’ te dirai : choléra, Fumier, poison, putain ou vache, Comme on s’appell’ quand on s’aim’ pus. J’ turbin’rai pour toi, s’il le faut ! Jamais je n’ te mettrai su’ l’ tas : Et, si j’ peux pas trouver d’ boulot, J’ grinch’rai, j’ truqu’rai, j’ f’rai... j’ sais pas quoi J’ la f’rai à la dure au besoin ! Dis, Môm’, tu l’ouvres pas souvent ; D’pis qu’on s’ ballade y a qu’ moi qui cause ! Quiens, nous y v’là à la barrière.... Viens Môm’, descendons dans l’ fossé, Donn’-moi la main pour pas glisser (C’est plein d’ charogn’s et d’ tessons d’ verre) ; Là-bas, j’ guigne un coin pour s’asseoir, N’avec un buisson où s’ cacher ; Là on peut camper jusqu’au soir, Personn’ vienra nous y sercher. Dis, Môm’, maint’nant y faut m’ montrer Tes beaux petits rondins bombés..... Donne... ah ! ben vrai, c’ qu’y sont gentils ! (C’est pas ces gros tétons d’ borgeoise Qui dégoulin’nt jusqu’au nombril !) Ben dis donc ! Moi j’ veux les p’loter ; Euss ont deux bell’s petit’s framboises Qui donn’nt envie d’ les boulotter ! Dis, Môm’..., sans trich’, j’ suis-t’y l’ preumier ? Dans l’ quartier ou dans ta maison, Les collidors, les escaïers, Personne il a voulu... t’ coincer ! Ni vot’ voisin... le vieux garçon, Ni l’ merlan, le bouif, l’épicier Ni tes frangins... ni... ton daron ? Ça n’arriv’ pas toujours... ben sûr ; Mais j’en conobl’ qu’est si tassés Dans leurs piaul’s en boît’s à homard, Qu’ les Sam’dis d’ paie, quand y rentr’nt mûrs, Gn’y a des fois qu’y s’ gour’nt de plumard ! Nibé, Môme !... Alorss... t’es ma « neuve » ? Ben, j’en r’viens pas... j’en suis comm’ saoul, J’ peux pus cracher... j’ai l’ sang qui m’ bout ; Tu parl’s si pour toi j’ai la gaule ! Quiens, pos’ ta têt’ su’ mon épaule, Tu m’aim’s, tu m’aim’s, dis, répèt’-le ? Môm’, j’ vourais t’ manger, j’ vourais t’ boire. Donn’ ta tit’ langu’, donn’ ta tit’ gueule Qu’est pas pu gross’ qu’un bigarreau. J’ te fais mal ? Pardon... je l’ f’rai pus... Tu sais... si j’ m’aurais pas r’tenu, J’aurais mordu d’dans tout à fait ! Mais prends gard’, Môm’, m’ fais pas d’ paillons, Pass’ qu’alors si jamais j’ te paume, A pès’ra pas lourd la bell’ Môme ! Tu vois mon lingu’ ? N’ te fais pas d’ mousse ; Avant d’ crever ton amoureux, J’ lard’rai ta bell’ petit’ frimousse ; Comm’ ça... tu f’ras pus d’ malheureux ! Môm’, tu m’affol’s ! Môm’, je t’adore ! Un baiser, Môm’, dis... un baiser ? De quoi ? Tu veux pus t’ laisser faire ? Ah ! vvvache... tu vas pas m’ fair’ poser ! T’ y pass’ras comme à ton baptême ; J’ te veux... j’ te tiens... j’ t’aurai quand même, Et n’ gueul’ pas ou j’ vas t’écraser.... Ah ! Môme à moi... je t’aim’, je t’aime !
6.
Le Piège 11:16
Les soirs de Mai, quand l’Ovréier Sort de l’usine ou d’ l’atéier, Libre et pas gai, sa jornée faite, Fourbu par le boulot du jour, Général’ment y rentr’ chez lui Comme un carcan à l’écurie, Sans seul’ment retourner la tête. Mais… y a des soirs ousqu’y s’arrête À regarder grouiller l’ Faubourg Et pis aussi les alentours. Ce soir, l’Ovréier est rêveur.... Ce pétard, c’ mouv’ment du faubourg, Ces ruisseaux bleus, ces crottoirs roses, C’te bris’ fraîch’ su’ sa tronche en sueur, Y sait pas porquoi... Ça l’ dispose Et ça yi grimpe au ciboulot. « Gn’y a pas, qu’y s’dit en s’ graffouillant, Gn’y a pas d’erreur, c’est gigolo ; La Vie, c’est pas pus toc qu’aut’ chose, Seul’ment ça dépend d’ la saison... » Et le Prolo, au coin d’ la rue, Boit la senteur du mois d’ Marie ; Y s’ rinc’ l’oeil, y tette, y respire, Ça yi fait doux par tout’ la chair Depis le nombril jusqu’aux tifs. Y n’est pas long à arriver À la caserne ousqu’on l’espère, Et, après des tas d’escaïers Le v’là dans sa tôle au sizième ! Sa ménagère yi dit : « Bonsoir ? » Lui yi rétorqu’ : « ...soir, ça boulotte ? » Et le v’là parti à s’asseoir. Où sont les môm’s ? Y sont pas là. Gn’en a qu’ est à gouaper quéqu’ part, Gn’en a un qu’ est au cours du soir, Gn’en a un aute au régiment, Et gn’en a un qu’ est au ballon N’a fait quéqu’ sal’ coup... on sait pas. Quant aux fill’s, gn’en a justement Eun’ qui n’a su que s’ faire enfler, Et depis… y en a pus d’ nouvelles… A doit êt’ morte ou tournée grue. Devant ce foyer déserté L’ Travailleur se sent... embêté. Sa jigi fouille au plat et l’ sert Eun’ ratatouille à pomm’s de terre, Et tous deux, sans s’ causer encore, Mastiquent, lapp’nt, loufent, tortorent, L’Ovréiers’ dit : « Cré nom dé dié, Quoi que j’ vas foutre ed’ ma soirée ? Aller boir’ chez l’ bistrot un verre ? Ou aller au Café-Concert... » Y s’ dresse, y s’étir’ ! N’a la flemme : « Autant s’aller plumer ! » qu’y s’dit. Sa femme, a y est déjà partie, Alle est dans la planque à côté, Su’ leur pauv’ galett’ de mat’las Montée su’ patt’s et qu’ est un pieu, (Mêm’ qu’on l’entend ronfler déjà Pir’ qu’un volant ou qu’eun’ turbine) Alorss... lui aussi y n’y va ; Y pénètr’ dans sa bonbonnière.... Nom de nom ! N’y fait chaud ce soir. Et l’Ovréier y jett’ sa bâche, Pis y dépiaut’ son culbutant L’ est quasi comm’ le père Adam. Ben vrai ! C’ que l’ Travail en a fait ! Son anatomie est usée, N’a des jointur’s ankylosées, Y n’est plein d’ tar’s et d’éparvins ! À tout jamais il est atteint Dans sa noblesse et sa beauté ! Mais quoi qu’il a à s’ dandiner, À stopper... à hésitailler ? À r’garder sa Marie qui pionce Innocemment, le blair dans l’ mur, L’Ovréiers’ dit qu’en r’montant c’ soir, Comm’ ça, tout le long du faubourg, Outre la merde et les lilas, Ça sentait ben un peu l’Amour ! Gn’y avait des nuqu’s grass’s et dodues, Des p’tit’s bergèr’s en camisoles, Dans quoi tressautaient des tétons Qui d’vaient êt’ beaux, durs et pointus. Gn’y avait des p’tits pieds, des p’tit’s mains, Des corsag’s ouverts, d’ la chair nue Et des croupions de p’tit’s morues Qu’on aurait troussés en cinq sec ! L’Ovréier, y r’pense à tout ça On peut dir’ presque malgré lui, Car son Épouse, alle est ben moche.... Bédam’ ! vous pensez, le turbin, La dèch’, les soucis, l’ manqu’ de soins, Pis toujours ête outil d’ besoins Et pis toujours ête eun’ pondeuse... Ça use aussi avant vot’ temps, Ça vous dégrade el’ monument, Ça vous ronge... ça vous détruit! Son Homm’, lui, y vit dans l’ dégoût ; Gn’y a ben longtemps qu’y n’y caus’ pus, Juste ed’ quoi y compter sa paie ; Mais ce soir vraiment, nom de nom, Y n’a quét’ chos’ comme un retour, Un r’gain, un fri-fri qui l’ tracasse Et lui trott’ par tout’ la carcasse... Salaud d’ Printemps !... Cochon d’ faubourg ! D’abord y veut pas, y s’ raisonne ; Ji, tout d’un coup, sans avertir, Comm’ ça... rebrusquer son Ancienne Qu’ estputôtdign’ d’êt’ respectée ! (Ça n’a pas d’ bon sens ni d’ pitié C’est quasiment d’un criminel !) Mais quoi... y n’a qu’ell’ sous la main ! Les cochons n’auront jamais d’ perles, Les cochons n’auront jamais d’ perles ! Faut’ d’ortolans on bouff’ des merles, Faut’ de brioche on s’ call’ du pain ! Pis y a pas... v’là la sèv’ qui monte ; La Vie, a gronde en ses rognons ; Et v’lan ! Boum ! L’Ovréier r’tourn’ sa légitime Laquelle effarée rouvr’ les z’yeux Ayant l’air de dir’ : « C’ qu’y a l’ feu ? » Et, sans mamours préparatoires, Sans un bécot, sans rien d’ gentil, Y l’écart’, la s’coue, la harponne, Y la coltine, y la cramponne, Y la bouscule, y la rouscaille... Et, en gueulant comme un putois, Y yi enfourne encore eun’ fois Jusqu’au fin fond d’ sa vieill’ berdouille, D’ la grain’ de vie, d’ la pâte à mômes, D’ la chair à turbin comme lui ! Aussi c’te pauv’ femm’ réveillée Fait h’eun’ tass’ toute émerveillée : « Quoi que y a pris à son mari ? Pourtant y n’avait pas l’air cuit, Quand y n’est rentré tout à l’heure. » Car, elle, a n’y a vu qu’ du feu, A n’a quasiment rien senti, A s’est prêtée... alle a subi ; Mais as’ dit : « Quoi... c’est sa façon, Et faut y fair’ croir’ qu’ c’était bon ! » Et v’là qu’a geint, v’là qu’a soupire, V’là qu’a gazouill’, v’là qu’a s’ tortille, V’là qu’a lui fait un peu d’ chiqué... (Chacun son genr’ de charité !) Seul’ment lui n’est pas aussi poire, Et y sait ben c’ qu’il en faut croire ; Y s’arr’lève, y yi tourne el’ dos Sans eun’ caress’, sans un p’tit mot, Y n’est calmé... y réchéflit, Y réflexionn’ su’ c’ qu’y vient d’ faire, Y sent qu’ c’esth’encoreun’ conn’rie ! « Ah ! nom de Dieu, c’est cor le Piège ! » Y s’a laissé chopper encore Et à preusent il est trop tard ! Comment couper à la misère ? Ben sûr que c’était pas l’ moyen D’empêcher les grèves, les guerres, Les chômages, les maladies.... « Bon dieu d’ nom de Dieu d’ salop’rie ! Gn’y a donc pas assez d’ malheureux Qui chinent et peinent su’ la Terre. » Vrai, en c’ moment, s’il le pourrait, Y s’ bott’rait l’ cul avec plaisir.... Mais quoi, ct’e judas s’ried’ Nature Qu’ est toujours pus marioll’ que lui ! Alorss, en songeant à tout ça Ses idées s’ brouill’nt, son coeur se gonfle, Et son front ridé dans les mains, À tourner, r’tourner son malheur, Tout d’un coup jaillit sa douleur Su’ sa pauv’ gueule en deux ruisseaux ; Et l’ restant d’ la nuit là, y d’meure Et l’ restant d’ la nuit là, y pleure Su’ sa limac’ de cravailleur..... Su’ sa pauv’ liquette à carreaux.
7.
Tu ne tueras point. « Bonjour, c’est moi… moi, ta m’man. J’ suis là, d’vant toi au cèmetière. (Aujord’hui y aura juste un an, Un an passé d’pis… ton affaire.) Louis ? Mon petit… m’entends-tu seul’ment ? T’entends-t’y ta pauv’ moman d’ mère ? Ta « Vieill’ », comm’ tu disais dans l’ temps. Ta Vieill’, qu’alle est v’nue aujord’hui Malgré la bouillasse et la puïe. Alors… on m’a pas trompé d’ lieu ? C’est ben ici les « Condamnés » ? C’est là qu’ t’es d’pis eun’ grande année ? Mon dieu mon dieu ! Mon dieu mon dieu ! Y a pas eun’ tomb’, pas un bout d’ croix ! Y a rien qui marqu’ ta fosse à toi, Pas un sign’, pas un nom d’ baptême Et rien non pus pour t’abriter… (J’ dis pas qu’ tu l’as point mérité, Mais pour eun’ mère, c’est dur tout d’ même !) Louis, tu sais, faut que j’ te confesse ; D’pis un an… d’pis… ton histoire J’ suis pus tournée qu’aux idées noires Et j’ai l’ coeur rien qu’à la tristesse. Aussi preusent j’ suis tout’ sangée, J’ suis blanchie, courbée, ravagée Par la honte et par le tourment ; Si tu pourrais m’ voir à preusent Tu m’ donn’rais pus d’ quatre-vingts ans. Et pis j’ai eu ben d’ la misère, Quand qu’on a su qu’ j’étais ta mère, J’ai pus trouvé un son d’ouvrage, On m’a méprisé dans l’ quartier Et l’a fallu que j’ déménage. Depis… dans mon nouveau log’ment J’ vis seule… ej’ peux pas dir’ comment, Comme eun’ dormeuse, eun’ vraie machine ; J’ cause à personn’ de not’ malheur. J’ pense à toi, et tout l’ jour je pleure, Mêm’ quand que j’ suis à ma cuisine. L’ matin, ça m’ prend dès que j’ me lève ; J’ te vois, j’ te caus’… tout haut… souvent, Comm’ si qu’ tu s’rais encor vivant ! J’ mang’ pus… j’ dors pus, tant ça m’ fait deuil Et si des fois j’ peux fermer l’oeil, Ça manqu’ pas, tu viens dans mes rêves. Pens’ Louis, dans l’ temps, quand t’étais p’tit, Qui qu’aurait cru… qui m’aurait dit Qu’ tu finirais comm’ ça un jour Et qu’ moi… on m’ verrait v’nir ici ! Quand t’étais p’tit t’étais si doux ! A c’ t’ heur’ j’arr’vois tout not’ passé, Comme ej’ t’aimais, comme on s’aimait, Qu’on était heureux tous les deux, Malgré des fois des moments durs Où y avait rien à la maison ; Comme ej’ t’aimais, comme on s’aimait, C’était toi ma seul’ distraction, Mon p’tit mari, mon amoureux. C’est pas vrai, est-c’ pas ? C’est pas vrai Tout c’ qu’on a dit d’ toi au procès ; Su’ les jornaux c’ qu’y avait d’écrit, Ça n’était ben sûr qu’ des ment’ries… Mon P’tit à moi n’a pas été Si mauvais qu’on l’a raconté ! (Sûr qu’étant môme, comm’ tous les mômes, T’étais des fois ben garnement, Mais pour crapule… on peut pas l’ dire !) T’étais si doux et pis… si beau… Mon plaisir, c’était l’ soir venu Avant que d’ te mette au dodo, De t’ déshabiller tout « entière », Tant c’était divin d’ te voir nu : Et j’ t’admirais, j’ te cajolais, J’ te faisais « proutt » dans ton p’tit dos, Et j’ te bisais ton p’tit darrière… (J’ t’aurais mangé si j’aurais pu) Et toi… t’étais si caressant Et rusé… et intelligent… Oh ! intelligent, fallait voir, Pour c’ qui regardait la mémoire T’apprenais tout c’ que tu voulais… Tu promettais, tu promettais… Ah ! dir’ qu’ t’es là-d’ssous à preusent Par tous les temps qu’y neige ou pleuve ! (Vrai ! Qué crèv’-coeur ! Qué coup d’ couteau !) T’ rappell’s-tu, quand tu t’ réveillais, Le croissant chaud, l’ café au lait ? T’ rappell’s-tu comme ej’ t’habillais ? Qui faisait tes quatr’ volontés, Qui t’a pourri, qui t’a gâté, Qui c’est qu’y n’ t’a jamais battu ? C’est-y moi ou ben la voisine ? Et à présent qu’ te v’là ici, Comme un chien crevé, eune ordure, Comme un fumier, eun’ pourriture, Qui c’est qui malgré tout vient t’ voir ? Qui qui t’esscuse et qui t’ pardonne ? Qui c’est qu’en est la pus punie ? C’est ta Vieill’, tu sais, ta fidèle, Ta pauv’ vieill’ loqu’ de Vieill’ vois-tu ! Mais j’ bavard’, moi, j’us’ ma salive ; La puïe cess’ pas, la nuit arrive ; Faut que j’ m’en aill’ moi… il est l’heure. Maint’nant c’est si loin où j’ demeure.
8.
Le Revenant 11:03
Si qu’y r’viendrait… Qui ça ?…Ben quoi ! Vous savez bien, Eul’ trimardeur galiléen, L’ Rouquin au coeur pus grand qu’ la Vie ! Si qu’y r’viendrait, l’Agneau sans tache ; Si qu’y r’viendrait, l’ Bâtard de l’Ange ? Si qu’y r’viendrait ? Si qu’y r’viendrait ? L’ gars dont l’ jacqu’ter y s’en allait Comme qui eût dit un ruisseau d’ lait. C’lui qui disait à ses Apôtres : - Aimez-vous ben les uns les autres, Faut tous êt’ copains su’ la Terre, Faudrait voir à c’qu’y gn’ait pus d’guerres Et voir à n’ pus s’buter dans l’ nez, Autrement vous s’rez tous damnés. L’Homme aux beaux yeux, l’Homme aux beaux rêves Eul’ charpentier toujours en grève, L‘artiss’, le meneur, l’anarcho. Si qu’y r’viendrait ? Si qu’y r’viendrait ? Eh ben ! moi… je lui dirais : « Bonsoir… te v’là ? Comment, c’est toi ? » Comme on s’ rencontr’… n’en v’là d’eun’ chance ! Tu m’épat’s… t’es sorti d’ ta Croix ? Viens ! qu’on te r’garde… ah ! comm’ t’es blanc. Ah ! comm’ t’es pâl’… comm’ t’as l’air triste. Ah ! comm’ t’es pâle… ah ! comm’ t’es blanc, Tu guerlott’s, tu dis rien… tu trembles. T’as pas bouffé, sûr… ni dormi ! Pauv’ vieux, va… Veux-tu qu’on s’assoye su’ un banc, Ou veux tu qu’on balade ensemble… Ah ! comm’ t’es pâle… ah ! comm’ t’es blanc, Sais-tu qu’ t’as l’air d’un Revenant, Ou d’un clair de lune en tournée ? Quéqu’ tu viens fair’ ? T’es pas marteau ? D’où c’est qu’ t’es v’nu ?D’en bas, d’en haut ? Quelle est la rout’ que t’as suivie ? Es-tu v’nu sercher du cravail ? (Ben… t’as pas d’ vein’, car en c’ moment, Mon vieux, rien n’ va dans l’ bâtiment Pis, tu sauras qu’ su’ nos chantiers On veut pus voir les étrangers !) Quoi tu pens’s de not’ Société ? Voyons ? Cause un peu ? Tu dis rien ! T’es là comme un paquet d’ rancoeurs. T’es muet ? T’es bouché, t’es aveugle ? Ed’ ton temps, c’était comme aujord’hui ? Quand un gas tombait dans la pure Est-c’ qu’on l’ laissait crever la nuit Sans pèz’, sans rif et sans toiture ? Ousqu’il est ton ami Lazare ? Et Simon Pierre ? Et tes copains… Et Judas qui bouffait ton pain Tout en t’ vendant comme au bazar ? Te v’là, t’es seul ! On t’abandonne ! Eh ! blanc youpin… eh ! pauv’ raté ! Tout ton OEuvre il a avorté Toi, ton Etoile et ta Colombe Déringol’nt dans l’éternité ; Ohé, les beaux messieurs et dames Qui poireautez dans les Mad’leines, Curées, évêques, sacristains, Maçons, protestants, tout’ la clique, Maqu’reaux d’ vot’ Dieu, hé ! catholiques Envoyez-nous un bout d’hostie : G’na Jésus-Christ qui meurt de faim ! Et pourtant, vrai, c’ qu’on caus’ de toi ! (Ah ! faut voir ça dans les églises, Dans les jornaux, dans les bouquins !) Tout l’ monde y bouff’ de ton cadavre (Même les ceuss qui t’en veul’nt le plus !) (Toi, au moins t’étais sincère, Tu marchais… tu marchais toujours ; (Ah ! coeur amoureux, coeur amer) Tu marchais mêm’ dessur la mer Et t’as marché… jusqu’au Calvaire !) Et dir’ que nous v’là dans les rues, (Nous, passe encor, mais toi ! oh ! toi !) T’es presque à poils comme autrefois, Mais gn’a donc pus rien dans le ciel ! Sûr ! gn’a pus rien, mêm’ que peut-être Y gn’a jamais, jamais rien eu… Si on te servait tes Paraboles ! Heureux les Simpl’s, heureux les Pauvres, Eul’ Royaum’ des Cieux est à euss. (C’est avec ça qu’on nous empaume, Qu’on s’ cal’ des briqu’s et des moellons) Ben, tu sais, j’ m’en fous d’ ton Royaume ; J’am’rais ben mieux des patalons Eun’ soupe, eun’ niche et d’ l’amitié. (Car quoiqu’ t’ ay’ bien fait ton métier Toi, ton grand coeur et ta pitié, N’empêch’nt pas d’avoir froid aux pieds !) Ah ! toi qu’on dit l’Empereur des Pauvres Ben ton règne il est arrivé. Oh ! voui t’es là d’pis deux mille ans Su’ un bout d’ bois t’ouvr’ tes bras blancs Oh ! oui t’es là, t’ouvr’ tes bras blancs Et vrai d’pis l’ temps qu’on t’a figé C’ que t’en as vu des affligés, Des fous, des sag’s ou des d’moiselles Combien d’ mains s’ sont tendues vers toi Sans qu’ t’aye pipé, sans qu’ t’aye bronché ! Avoue-le va… t’es impuissant, Tu clos tes châss’s, t’as pas d’scrupules, Tu protèg’s avec l’ mêm’ sang-froid L’ sommeil des Bons et des Crapules. Et quand on perd quéqu’un qu’on aime, Tu décor’s, mais tu consol’s pas. Ah ! rien n’ t’émeut, va, ouvr’ les bras, Prends ton essor et n’ reviens pas ; T’es l’Etendard des sans-courage, T’es l’Albatros du Grand Naufrage, T’es le Goëland du Malheur ! T’as cru à l’Homm’ toi, ma pauv’ vieille ? Ah ben ! tu sais, nous, on n’ sait pus ! (Ventre affamé n’a pas d’oreilles Et les vent’s pleins n’en ont pas plus !) Pleur’ ! Pleure encor, pleur’ tout’s tes r’ssources Qu’ tes trous à voir d’vienn’nt deux grosses sources Et qu’ l’Univers en soye noyé ! Pleur’ ! pleure encore et sois béni, Ta banq’ d’amour a fait faillite. Ah ! le beau rêv’ que t’as conté. Ton Paradis ? La belle histoire Sans c’te vach’ de Réalité : Ton paradis ? la belle histoire ! (Ton paradis ? Eh ben ! c’était Un soliloque de malheureux !) Ah ! sors-toi l’ coeur, va, pauv’ panné, Pisqu’y gn’a pus personne qui t’aime Et qu’ te v’là comme abandonné Le cul su’ ta Mason ruinée, Sors-moi ton coeur désordonné Lui qui n’a su que pardonner, Tremp’-le dans la boue et dans l’ sang Et dans ton poing qu’y d’vienne eun’ fronde Et fous-le su’ la gueule au monde Y t’en s’ra p’têt’ reconnaissant ! Ou ben alors si tu peux pas, Si tu n’as pus rien dans les moelles, Retourn’ chez l’Accrocheur d’Etoiles, Remont’ là-haut ! Va dire au Père, A celui qui t’a envoyé, Quéqu’ chose qu’aurait l’air d’eun’ prière Qui s’rait d’ not’ temps, eh ! crucifié. Notre dab qu’on dit aux cieux, Notre daron qui êt’s si loin Si aveug’, si sourd et si vieux, Que Notre effort soit sanctifié, Que Notre Règne arrive A nous les Pauvr’s d’pis si longtemps, Su’ la Terre où nous souffrons Où l’on nous a crucifiés Ben pus longtemps que vot’ pauv’ fieu Qu’a d’jà voulu nous dessaler. Que Notre volonté soit faite Car on vourait le Monde en fête, D’ la vraie Justice et d’ la Bonté, Donnez-nous tous les jours l’ brich’ton régulier (Autrement nous tâch’rons d’ le prendre) ; Fait’s qu’un gas qui meurt de misère Soye pus qu’un cas très singulier. Donnez-nous l’ poil et la fierté Et l’estomac de nous défendre, Pardonnez-nous les offenses Que l’on nous fait et qu’on laiss’ faire Et ne nous laissez pas succomber à la tentation De nous endormir dans la misère Et délivrez-nous de la douleur ………………… (Ainsi soit-il !)

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La musique à consonnances électroniques porte les vers intemporels de Jehan Rictus. Ces mots d’un autre siècle conservent tout leur sens sur les nappes entêtantes, les ambiances rugueuses et les beats puissants inspirés de la trap moderne et de l’abstract hip-hop.

Les portraits rarement teintés d’espoir de cet enfant maltraité devenu adulte, sont soutenus, enveloppés, contenus puis recrachés par des créations musicales toute aussi sombres que ses vers.

credits

released June 2, 2021

Auteur : Jehan Rictus
Compositeur : Brice Terrié
Voix lead : Anne Raturier & Vincent Bouyé
Backs : Brice Terrié
Mixage / Mastering : Rudolf Mulot
Graphisme : Lucie LaLuz

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Cie La Mouche La Roche Sur Yon, France

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