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Jasante de la Vieille

from De mis​è​re et d'amour by Cie La Mouche

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lyrics

Tu ne tueras point.

« Bonjour, c’est moi… moi, ta m’man.
J’ suis là, d’vant toi au cèmetière.
(Aujord’hui y aura juste un an,
Un an passé d’pis… ton affaire.)

Louis ?
Mon petit… m’entends-tu seul’ment ?
T’entends-t’y ta pauv’ moman d’ mère ?
Ta « Vieill’ », comm’ tu disais dans l’
temps.

Ta Vieill’, qu’alle est v’nue aujord’hui
Malgré la bouillasse et la puïe.

Alors… on m’a pas trompé d’ lieu ?
C’est ben ici les « Condamnés » ?
C’est là qu’ t’es d’pis eun’ grande
année ?
Mon dieu mon dieu ! Mon dieu mon
dieu !

Y a pas eun’ tomb’, pas un bout d’
croix !
Y a rien qui marqu’ ta fosse à toi,
Pas un sign’, pas un nom d’ baptême
Et rien non pus pour t’abriter…

(J’ dis pas qu’ tu l’as point mérité,
Mais pour eun’ mère, c’est dur tout d’
même !)

Louis, tu sais, faut que j’ te confesse ;
D’pis un an… d’pis… ton histoire
J’ suis pus tournée qu’aux idées noires
Et j’ai l’ coeur rien qu’à la tristesse.

Aussi preusent j’ suis tout’ sangée,
J’ suis blanchie, courbée, ravagée
Par la honte et par le tourment ;
Si tu pourrais m’ voir à preusent
Tu m’ donn’rais pus d’ quatre-vingts ans.
Et pis j’ai eu ben d’ la misère,
Quand qu’on a su qu’ j’étais ta mère,
J’ai pus trouvé un son d’ouvrage,
On m’a méprisé dans l’ quartier
Et l’a fallu que j’ déménage.

Depis… dans mon nouveau log’ment
J’ vis seule… ej’ peux pas dir’
comment,
Comme eun’ dormeuse, eun’ vraie
machine ;
J’ cause à personn’ de not’ malheur.
J’ pense à toi, et tout l’ jour je pleure,
Mêm’ quand que j’ suis à ma cuisine.

L’ matin, ça m’ prend dès que j’ me lève ;
J’ te vois, j’ te caus’… tout haut…
souvent,
Comm’ si qu’ tu s’rais encor vivant !
J’ mang’ pus… j’ dors pus, tant ça
m’ fait deuil
Et si des fois j’ peux fermer l’oeil,
Ça manqu’ pas, tu viens dans mes
rêves.

Pens’ Louis, dans l’ temps, quand
t’étais p’tit,
Qui qu’aurait cru… qui m’aurait dit
Qu’ tu finirais comm’ ça un jour
Et qu’ moi… on m’ verrait v’nir ici !

Quand t’étais p’tit t’étais si doux !
A c’ t’ heur’ j’arr’vois tout not’ passé,
Comme ej’ t’aimais, comme on
s’aimait,
Qu’on était heureux tous les deux,
Malgré des fois des moments durs
Où y avait rien à la maison ;
Comme ej’ t’aimais, comme on
s’aimait,
C’était toi ma seul’ distraction,
Mon p’tit mari, mon amoureux.

C’est pas vrai, est-c’ pas ? C’est pas
vrai
Tout c’ qu’on a dit d’ toi au procès ;
Su’ les jornaux c’ qu’y avait d’écrit,
Ça n’était ben sûr qu’ des ment’ries…

Mon P’tit à moi n’a pas été
Si mauvais qu’on l’a raconté !
(Sûr qu’étant môme, comm’ tous les
mômes,
T’étais des fois ben garnement,
Mais pour crapule… on peut pas l’ dire !)

T’étais si doux et pis… si beau…

Mon plaisir, c’était l’ soir venu
Avant que d’ te mette au dodo,
De t’ déshabiller tout « entière »,
Tant c’était divin d’ te voir nu :

Et j’ t’admirais, j’ te cajolais,
J’ te faisais « proutt » dans ton p’tit
dos,
Et j’ te bisais ton p’tit darrière…

(J’ t’aurais mangé si j’aurais pu)
Et toi… t’étais si caressant
Et rusé… et intelligent…
Oh ! intelligent, fallait voir,

Pour c’ qui regardait la mémoire
T’apprenais tout c’ que tu voulais…
Tu promettais, tu promettais…

Ah ! dir’ qu’ t’es là-d’ssous à preusent
Par tous les temps qu’y neige ou
pleuve !
(Vrai ! Qué crèv’-coeur ! Qué coup d’
couteau !)

T’ rappell’s-tu, quand tu t’ réveillais,
Le croissant chaud, l’ café au lait ?
T’ rappell’s-tu comme ej’ t’habillais ?

Qui faisait tes quatr’ volontés,
Qui t’a pourri, qui t’a gâté,
Qui c’est qu’y n’ t’a jamais battu ?

C’est-y moi ou ben la voisine ?

Et à présent qu’ te v’là ici,
Comme un chien crevé, eune ordure,
Comme un fumier, eun’ pourriture,

Qui c’est qui malgré tout vient t’ voir ?
Qui qui t’esscuse et qui t’ pardonne ?
Qui c’est qu’en est la pus punie ?

C’est ta Vieill’, tu sais, ta fidèle,
Ta pauv’ vieill’ loqu’ de Vieill’ vois-tu !

Mais j’ bavard’, moi, j’us’ ma salive ;
La puïe cess’ pas, la nuit arrive ;
Faut que j’ m’en aill’ moi… il est
l’heure.
Maint’nant c’est si loin où j’ demeure.

credits

from De mis​è​re et d'amour, released June 2, 2021

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