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Le Pi​è​ge

from De mis​è​re et d'amour by Cie La Mouche

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lyrics

Les soirs de Mai, quand l’Ovréier
Sort de l’usine ou d’ l’atéier,
Libre et pas gai, sa jornée faite,
Fourbu par le boulot du jour,
Général’ment y rentr’ chez lui
Comme un carcan à l’écurie,
Sans seul’ment retourner la tête.
Mais… y a des soirs ousqu’y s’arrête
À regarder grouiller l’ Faubourg
Et pis aussi les alentours.
Ce soir, l’Ovréier est rêveur....
Ce pétard, c’ mouv’ment du faubourg,
Ces ruisseaux bleus, ces crottoirs roses,
C’te bris’ fraîch’ su’ sa tronche en sueur,
Y sait pas porquoi... Ça l’ dispose
Et ça yi grimpe au ciboulot.
« Gn’y a pas, qu’y s’dit en s’ graffouillant,
Gn’y a pas d’erreur, c’est gigolo ;
La Vie, c’est pas pus toc qu’aut’ chose,
Seul’ment ça dépend d’ la saison... »
Et le Prolo, au coin d’ la rue,
Boit la senteur du mois d’ Marie ;
Y s’ rinc’ l’oeil, y tette, y respire,
Ça yi fait doux par tout’ la chair
Depis le nombril jusqu’aux tifs.
Y n’est pas long à arriver
À la caserne ousqu’on l’espère,
Et, après des tas d’escaïers
Le v’là dans sa tôle au sizième !
Sa ménagère yi dit : « Bonsoir ? »
Lui yi rétorqu’ : « ...soir, ça boulotte ? »
Et le v’là parti à s’asseoir.
Où sont les môm’s ? Y sont pas là.
Gn’en a qu’ est à gouaper quéqu’ part,
Gn’en a un qu’ est au cours du soir,
Gn’en a un aute au régiment,
Et gn’en a un qu’ est au ballon
N’a fait quéqu’ sal’ coup... on sait pas.
Quant aux fill’s, gn’en a justement
Eun’ qui n’a su que s’ faire enfler,
Et depis… y en a pus d’ nouvelles…
A doit êt’ morte ou tournée grue.
Devant ce foyer déserté
L’ Travailleur se sent... embêté.
Sa jigi fouille au plat et l’ sert
Eun’ ratatouille à pomm’s de terre,
Et tous deux, sans s’ causer encore,
Mastiquent, lapp’nt, loufent, tortorent,
L’Ovréiers’ dit : « Cré nom dé dié,
Quoi que j’ vas foutre ed’ ma soirée ?
Aller boir’ chez l’ bistrot un verre ?
Ou aller au Café-Concert... »
Y s’ dresse, y s’étir’ ! N’a la flemme :
« Autant s’aller plumer ! » qu’y s’dit.
Sa femme, a y est déjà partie,
Alle est dans la planque à côté,
Su’ leur pauv’ galett’ de mat’las
Montée su’ patt’s et qu’ est un pieu,
(Mêm’ qu’on l’entend ronfler déjà
Pir’ qu’un volant ou qu’eun’ turbine)
Alorss... lui aussi y n’y va ;
Y pénètr’ dans sa bonbonnière....
Nom de nom ! N’y fait chaud ce soir.
Et l’Ovréier y jett’ sa bâche,
Pis y dépiaut’ son culbutant
L’ est quasi comm’ le père Adam.
Ben vrai ! C’ que l’ Travail en a fait !
Son anatomie est usée,
N’a des jointur’s ankylosées,
Y n’est plein d’ tar’s et d’éparvins !
À tout jamais il est atteint
Dans sa noblesse et sa beauté !
Mais quoi qu’il a à s’ dandiner,
À stopper... à hésitailler ?
À r’garder sa Marie qui pionce
Innocemment, le blair dans l’ mur,
L’Ovréiers’ dit qu’en r’montant c’ soir,
Comm’ ça, tout le long du faubourg,
Outre la merde et les lilas,
Ça sentait ben un peu l’Amour !
Gn’y avait des nuqu’s grass’s et dodues,
Des p’tit’s bergèr’s en camisoles,
Dans quoi tressautaient des tétons
Qui d’vaient êt’ beaux, durs et pointus.
Gn’y avait des p’tits pieds, des p’tit’s mains,
Des corsag’s ouverts, d’ la chair nue
Et des croupions de p’tit’s morues
Qu’on aurait troussés en cinq sec !
L’Ovréier, y r’pense à tout ça
On peut dir’ presque malgré lui,
Car son Épouse, alle est ben moche....
Bédam’ ! vous pensez, le turbin,
La dèch’, les soucis, l’ manqu’ de soins,
Pis toujours ête outil d’ besoins
Et pis toujours ête eun’ pondeuse...
Ça use aussi avant vot’ temps,
Ça vous dégrade el’ monument,
Ça vous ronge... ça vous détruit!
Son Homm’, lui, y vit dans l’ dégoût ;
Gn’y a ben longtemps qu’y n’y caus’ pus,
Juste ed’ quoi y compter sa paie ;
Mais ce soir vraiment, nom de nom,
Y n’a quét’ chos’ comme un retour,
Un r’gain, un fri-fri qui l’ tracasse
Et lui trott’ par tout’ la carcasse...
Salaud d’ Printemps !... Cochon d’ faubourg !
D’abord y veut pas, y s’ raisonne ;
Ji, tout d’un coup, sans avertir,
Comm’ ça... rebrusquer son Ancienne
Qu’ estputôtdign’ d’êt’ respectée !
(Ça n’a pas d’ bon sens ni d’ pitié
C’est quasiment d’un criminel !)
Mais quoi... y n’a qu’ell’ sous la main !
Les cochons n’auront jamais d’ perles,
Les cochons n’auront jamais d’ perles !
Faut’ d’ortolans on bouff’ des merles,
Faut’ de brioche on s’ call’ du pain !
Pis y a pas... v’là la sèv’ qui monte ;
La Vie, a gronde en ses rognons ;
Et v’lan ! Boum ! L’Ovréier r’tourn’ sa légitime
Laquelle effarée rouvr’ les z’yeux
Ayant l’air de dir’ : « C’ qu’y a l’ feu ? »
Et, sans mamours préparatoires,
Sans un bécot, sans rien d’ gentil,
Y l’écart’, la s’coue, la harponne,
Y la coltine, y la cramponne,
Y la bouscule, y la rouscaille...
Et, en gueulant comme un putois,
Y yi enfourne encore eun’ fois
Jusqu’au fin fond d’ sa vieill’ berdouille,
D’ la grain’ de vie, d’ la pâte à mômes,
D’ la chair à turbin comme lui !
Aussi c’te pauv’ femm’ réveillée
Fait h’eun’ tass’ toute émerveillée :
« Quoi que y a pris à son mari ?
Pourtant y n’avait pas l’air cuit,
Quand y n’est rentré tout à l’heure. »
Car, elle, a n’y a vu qu’ du feu,
A n’a quasiment rien senti,
A s’est prêtée... alle a subi ;
Mais as’ dit : « Quoi... c’est sa façon,
Et faut y fair’ croir’ qu’ c’était bon ! »
Et v’là qu’a geint, v’là qu’a soupire,
V’là qu’a gazouill’, v’là qu’a s’ tortille,
V’là qu’a lui fait un peu d’ chiqué...
(Chacun son genr’ de charité !)
Seul’ment lui n’est pas aussi poire,
Et y sait ben c’ qu’il en faut croire ;
Y s’arr’lève, y yi tourne el’ dos
Sans eun’ caress’, sans un p’tit mot,
Y n’est calmé... y réchéflit,
Y réflexionn’ su’ c’ qu’y vient d’ faire,
Y sent qu’ c’esth’encoreun’ conn’rie !
« Ah ! nom de Dieu, c’est cor le Piège ! »
Y s’a laissé chopper encore
Et à preusent il est trop tard !
Comment couper à la misère ?
Ben sûr que c’était pas l’ moyen
D’empêcher les grèves, les guerres,
Les chômages, les maladies....
« Bon dieu d’ nom de Dieu d’ salop’rie !
Gn’y a donc pas assez d’ malheureux
Qui chinent et peinent su’ la Terre. »
Vrai, en c’ moment, s’il le pourrait,
Y s’ bott’rait l’ cul avec plaisir....
Mais quoi, ct’e judas s’ried’ Nature
Qu’ est toujours pus marioll’ que lui !
Alorss, en songeant à tout ça
Ses idées s’ brouill’nt, son coeur se gonfle,
Et son front ridé dans les mains,
À tourner, r’tourner son malheur,
Tout d’un coup jaillit sa douleur
Su’ sa pauv’ gueule en deux ruisseaux ;
Et l’ restant d’ la nuit là, y d’meure
Et l’ restant d’ la nuit là, y pleure
Su’ sa limac’ de cravailleur.....
Su’ sa pauv’ liquette à carreaux.

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from De mis​è​re et d'amour, released June 2, 2021

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